LIONEL JOSPIN ET LE SYNDROME DE TRALONCA





En septembre dernier, Lionel Jospin s’était montré très ferme envers la communauté nationaliste. Le Premier Ministre avait rappelé aux porteurs de cagoule ( de plus en plus nombreux depuis l’affaire des paillotes ) que l’arrêt de la violence clandestine était un préalable à toute discussion pour une possible évolution statutaire de l’île.
On s’en souvient encore, les élus de Corsica Nazione, pourtant habitués aux grands coups médiatiques, étaient restés médusés et impuissants face à Lionel Jospin (photo ci-contre).
Certains spécialistes des affaires corses avaient prédit l’explosion du mouvement nationaliste.
En fait, quatre partis autonomistes se sont regroupés et ont revendiqué une lutte démocratique ( sans violence ) . A titre d’exemple, l’ancêtre « UPC » a fusionné avec le jeune mouvement « Scelta Nova » d’Achille Martinetti, une révolution…..
Les autres vitrines légales proches des clandestins se sont réunis autour d’UNITA.  Ce regroupement d’anciens frères ennemis a eu pour objet de définir un programme politique commun calqué sur l’indépendance de l’île. Ainsi, la coalition UNITA est la suite logique du Comité Nationaliste du Fium’orbu.
Sur le terrain militaire, les réactions violentes n’ont pas traîné : apparitions de nouveaux groupes armés, multiplication de plasticages, racisme, etc...
Cette flambée de violence n’a pas beaucoup convaincu l’opinion publique insulaire.
Les dérives de l’Etat ( la répression aveugle, les incendiaires du GPS et les sévères rapports parlementaires sur la sécurité ) associés aux attentats inutiles et odieux des clandestins dont l’opération « famille Launey » et les actions en plein jour d’Ajaccio, ont aussi choqué la population continentale.
Conclusion : à deux années des élections présidentielles, il semblerait qu’en septembre dernier, Lionel Jospin et ses proches collaborateurs ( le trio Schrameck-Chrisnacht-Walter ) aient mal calculé la donne politique.

La revendication des attentats de novembre, œuvre du pseudo CLANDESTINU ( voir le sévère tract dans la rubrique reportages 1999 ) a déclenché une réaction surprise chez le Premier Ministre de la République française.
Le futur candidat élyséen n’a plus évoqué de préalable à toute discussion, il veut négocier au grand jour. En décembre, il s’en suit une réunion à Matignon avec des élus de tous bords, et par la suite, le début d’une série de négociations clandestines.
Dans l’île, des consultations et des débats passionnés se sont succédés, un mot est resté sur toutes les lèvres : AUTONOMIE.
A droite, trois camps se sont formés : « les contre » du député Francisi, « les favorables sous certaines réserves » de Jean Baggioni et « les pour » du très conciliant José Rossi.
Malgré des divergences affichées, aucun d’entre eux ne donne une signification exacte au terme « autonomie ». Néanmoins le Président Rossi (photo ci-contre, à gauche), minoritaire à l’assemblée territoriale, a manifesté une volonté d’élargir la discussion avec les huit élus indépendantistes de Corsica Nazione. A titre anecdotique, ces derniers ont accusé la droite d’avoir plagié les vieilles revendications nationalistes.
A gauche, deux clans s’affrontent : « les ultras » du Parti Radical allié au PS local contre « les antis » du PCF. Au centre des débats, le très jacobin Ministre Zuccarelli rayonne par son absence et ses silences répétés…. Là aussi, les définitions du mot « autonomie » divergent et manquent de précisions. Certains élus, comme Paul Giaccobi (photo ci-contre, à droite), sont « pour » mais sans y attribuer une notion chère à Pierre Joxe, la reconnaissance juridique du Peuple corse.
Dans la famille nationaliste corse, la clarté est de mise car une autonomie et une reconnaissance de son peuple seraient gages de future indépendance.
Au niveau national, le PS, le PRG et DL sont favorables à une évolution institutionnelle du statut, voire davantage. Quant aux autres forces politiques telles le Mouvement des Citoyens, PCF, MPF, RPR et UDF, l’opposition est ferme.
Notre couple « Chirac-Jospin » n’est pas sur la même longueur d’ondes.
Et les citoyens corses ? On parle de référendum mais quelle signification serait donnée à la question posée au peuple ? Aujourd’hui, le doute et le flou artistique sont d’actualité comme ils l’ont toujours été depuis plus de trente ans.

La stratégie est habile car en recevant les représentants politiques de l'île à Paris, Lionel Jospin a réussit à planquer la phase secrète des pourparlers « Etat-FLNC ». A noter, qu’au plus fort de la négociation, le Canal Historique, le Front du 5 mai, Fronte Patriotu, Fronte Ribellu, Clandestinu et le FARC ont fusionné pour signer une trêve et former un seul et unique sigle, le FLNC.
Le Premier Ministre s’est-il aventuré sur un terrain miné ?
Depuis plusieurs semaines, on sait que des personnalités socialistes rencontrent fréquemment des clandestins du FLNC proches de Talamoni. Apparemment, les réseaux « Pasqua » et le Ministre de l’Intérieur Jean-Pierre Chevènement ( relayé par Georges Sarre ) verraient d’un mauvais œil cette démarche. D’ailleurs dans un entretien accordé au Monde, les clandestins confirment ces propos :  « - Qu'est-ce qui pourrait mettre en péril le cessez-le-feu actuel ?
- Nous savons que certains magistrats et policiers, ainsi que des membres du réseau de l'ancien ministre de l'intérieur Charles Pasqua, ne voient pas d'un bon oeil le processus de paix en cours. D'autant que Lionel Jospin pourrait en tirer un bénéfice politique évident. De plus, l'actuel ministre de l'Intérieur, Jean-Pierre Chevènement, qui se fait le chantre d'un jacobinisme intransigeant, peut aussi avoir envie de faire déraper la situation. Une provocation est toujours possible. » .
Curieusement, Lionel Jospin ne semble pas tenir compte du dernier rapport parlementaire intitulé : « La sécurité, un droit pour les Corses, un devoir pour l’Etat » .
L’épisode de Tralonca et ses conséquences désastreuses ont eu un effet direct sur l’assassinat de Claude Erignac. Au passage, la veuve du Préfet semble très mal digérer les négociations actuelles. L’opération loupée de  Tralonca a démontré les carences de l’Etat en matière de sécurité. Cette parodie décrite ci-dessous a démontré l’existence de tractations quasi officielles et de consignes de « laisser-aller » délivrées par l’autorité politique aux services de sécurité et de justice. Quel dommage, la Commission d’enquête parlementaire aurait pu auditionner le négociateur numéro 1, un certain François Santoni(photo ci-contre). Ce dernier, ancien leader du Canal Historique, n’a jamais caché ses rapports privilégiés avec le Ministère de l’intérieur ( de1995 à 1996 ) . Son analyse relative à l’échec des négociations et au plasticage de la mairie de Bordeaux aurait pu éclairer nos parlementaires, dommage…..
Les auditions ci-dessous sont axées sur l’épisode de Tralonca, elles vous permettront de comprendre les tenants et les aboutissants d’une lamentable opération.
Surtout, n’oubliez pas de télécharger l’audition de l’incontournable Jean-Louis Debré, avec en prime quelques bobards et un véritable réquisitoire……..

A présent, reste à savoir, si l’aventure désastreuse de Tralonca ne se rejoue pas.
A suivre.…….

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