LA DESTRUCTION DES PONTONS ET PORTS PRIVES DE SAINT-FLORENT


L'affaire commence au mois de juillet, en pleine période estivale. La préfecture de Bastia ordonne l'ouverture d'une enquête publique sur le futur tracé du sentier du littoral des Agriates. Il se localise entre la commune de St-Florent et la plage de l'Ostriconi, soit une distance de 40 kilomètres. Malgré ses 1000 kilomètres de linéaires côtiers et ses innombrables espaces vierges de construction, la Corse dispose seulement de 13 km de sentiers balisés ( Cap Corse ).
 

  
Les agents de la DDE propose un curieux tracé qui va provoquer un malaise au sein de la population insulaire. Le litige se situe sur la zone comprise entre la plage de la Roya et l'anse de Fornali. Anciennement, cette partie du littoral appartenait à la famille Rotschild, mais la zone étant régulièrement la cible des plastiqueurs, elle fût divisée et vendue en diverses parcelles.
Parmi les nouveaux propriétaires de ces terrains longeant le littoral, on peut citer de vieilles connaissances du sérail parisien: Jean d'Ormesson, famille Verbeke, Comtesse de Beaumont, héritiers des sucres Béguin, etc... Des pancartes et des clôtures sont disposées pour dissuader plus d'un marcheur.
 
 
D'après la DDE, les  constructions, dont certaines ont "les pieds dans l'eau", ont été établies dans la plus grande légalité. De plus, toujours selon la DDE, elles n'empiéteraient pas sur la servitude de passage établie à 03 mètres ( loi liée au domaine public maritime ) .
Entre la plage de la Roya et la parcelle n°290 ( château de style écossais, d'Ormesson ) , la DDE estime qu'il n'est pas possible de longer le littoral. Elle propose de contourner l'ensemble des propriétés en empruntant une piste de terre située à 600 mètres du bord de mer, une curieuse appréciation de la définition du rivage....
 
  
Or, à l'examen des lieux ( minis criques, maquis, relief peu accidenté ), le passage piéton peut être facilement envisagé. La DDE aurait dû se baser sur une loi qui stipule, que l'on peut, pour des constructions établies avant 1976:
- contourner les maisons si elles sont à moins de 15 mètres du littoral.
- contourner le terrain s'il est clos de murs.
- ne pas tenir compte des occupations illégales du DPM.

Le dossier déposé par la DDE contient une cartographie qui fera l'objet de nombreuses controverses:
- présences de clôtures et murs non répertoriés.
- pistes et sentiers qui mènent au bord de mer non mentionnées.
- sentiers qui longent la mer oubliés.
- pontons et minis ports privés ignorés.

Début août, nous avons interrogé le directeur de la DDE de Haute Corse, Monsieur Guy de Bayeul, il nous a certifié que la carte et le tracé proposé étaient fiables.
Il nous a confirmé que les constructions suivantes étaient légales et n'occupaient pas le DPM:

  - La maison et la jetée situées sur la parcelle 63 a. (Mme Blanc Dominique ép Verbeke Albert).
  - Habitations et jetée  situées sur la  parcelle  60 a.
  - Habitations et mur  situées sur la parcelle  50, (Mme de Ribaud de la Raffinière)
  - Garages, jetée, et clôture  situés sur la parcelle 120, (Blanc Dominique, ép Verbeke Albert).
  - Garages, jetées et clôture barbelée situées sur la parcelle 419 a. (Mr d’Ormesson et Mr Moreuil).
  - Habitations,  jetées et clôture barbelée situées sur les parcelles :   568, 567, 285, 502, 500, et 282.

Malgré ça, le Préfet Lemaire a demandé à l'administration de prolonger d'un mois l'enquête d'utilité publique.

Mais revenons, plus en détail, sur ces fameux édifices portuaires qui font le bonheur et le confort des prestigieux résidents de St-Florent.
Lorsqu'on se penche sur les photographies aériennes et la carte de l'IGN, il est aisé de constater une myriade de violations du domaine public maritime.
Rappelons que la loi "littoral" considère le DPM  comme imprescriptible et inaliénable.
Or, il semblerait qu'il ne s'agit pas de construction de type "ponton démontable" mais d'édifice "en dur".
D'après le maire de St-Florent, certains ont été construits dans les années soixante et seraient utilisés par toute la population.
Pour en avoir le cœur net, nous avons accosté, caméra au poing, sur celui de Monsieur Jean d'Ormesson. Dès l'accostage, le personnel de maison a commencé à s'agiter dans tous les sens.
Au bout d'une minute, nous avons eu la visite du gardien de la propriété: altercations violentes, menaces et insultes dont nous gardons un formidable souvenir.
 


 
Sur le ponton et donc sur le DPM, nous avons interpellé Madame d'Ormesson, qui estime que ces minis ports font partie du patrimoine. Sentant la mauvaise tournure des événements, elle nous déclarera que "l'accès est libre pour tout le monde".
Quant à Jean, fidèle à la grande tradition des académiciens, il se fera très discret sur le sujet.
Ce petit incident nous conforte dans l'idée que nous étions rentrés sur un territoire étranger.

En octobre, Monsieur de Bayeul nous a confirmé que les minis ports de St-Florent sont installés illégalement sur le domaine public maritime.
D'après certaines indiscrétions, le Préfet de Corse, Jean-Pierre Lacroix envisagerait la destruction de ces constructions, un moindre mal pour ceux qui devront, comme tout le monde, payer un emplacement au port de St-Florent.
Quant au futur tracé du sentier du littoral, la décision sera prise bientôt par le Préfet de Haute-Corse. Devant le tollé général soulevé après le tracé de la DDE, il n'est pas impossible que celui-ci empiète sur les propriétés de nos célébrités locales.
Ce reportage commandé par la chaîne M6 n’a jamais été diffusé.