M. le Président
: Vous cernez donc d'assez près ce qui se passe dans ces mouvements
nationalistes et vous êtes informés quasiment au quotidien
sur ce genre de comportements. Comment expliquez-vous que pour l'affaire
de Tralonca les renseignements généraux ne semblent pas avoir
recueilli la moindre information qui aurait permis de mettre un terme à
cette manifestation ?
M. Yves BERTRAND :
Nous avons su quelques heures avant qu'une conférence de presse
allait se tenir, mais nous n'avions pas connaissance de sa localisation.
De même nous n'avons pas eu la localisation de la dernière
conférence de presse qui s’est tenue au sud de Bastia. Vous dites
que l'on sait à peu près tout. Non, il faut être très
modeste, nous sommes loin de tout savoir! Cette atomisation du mouvement
nationaliste rend la tâche de plus en plus difficile. Ce que l’on
savait, c’est que le FLNC Canal historique, dirigé par Santoni,
préparait une grosse démonstration de force dans le but de
négocier.
M. le Président
: Tralonca a réuni 600 personnes !
M. Yves BERTRAND :
Nous avons eu l'information, mais pas assez tôt.
M. le Président
: Comment expliquez-vous le fait que les gendarmes l'aient eue ?
M. Yves BERTRAND :
Les gendarmes ne me communiquent aucun renseignement ! Et s'ils ont vraiment
eu cette information, je suppose qu'ils l'ont transmise à leur hiérarchie.
Pour notre part, nous ne l'avons su que dans la soirée, dans les
heures qui ont précédé.
M. le Président
: Les gendarmes avaient identifié pratiquement toutes les voitures
qui se rendaient à cette manifestation clandestine, mais cela a
laissé, semble-t-il, tout le monde indifférent. Je vais donc
vous poser la question directement : aviez-vous reçu des ordres
du ministère de l’Intérieur pour vous désintéresser
de cette affaire ?
M. Yves BERTRAND :
Non, je n'ai pas reçu d'ordre de ce type, pas plus que mes collaborateurs.
Mon rôle n'est pas de faire de la politique, mais de savoir ; et
quand on ne sait pas, on n'est pas bon. Mais il est aussi très difficile
d’utiliser une information que l’on a trop tôt : j'en veux pour preuve
l'attentat de la mairie de Bordeaux dont l'information nous était
parvenue huit jours avant, sans que nous puissions l’empêcher.
M. le Président
: Avez-vous par la suite, mené des enquêtes sur ce dossier
?
M. Yves BERTRAND :
Après, c'était trop tard. Bien entendu nous avons obtenu
un certain nombre de renseignements permettant l'identification de certaines
personnes. Je pense d'ailleurs, effectivement, que les gendarmes avaient
transmis des listes de personnes ayant assisté à la conférence
de presse. Mais cette transmission s’est faite a posteriori.